La Laitière

Article | Les Echos

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Affichant de grandes ambitions en Europe, la marque de produits laitiers décline désormais son personnage emblématique dans différents pays.

Tout droit sortie du tableau de Vermeer, le personnage de La Laitière s'exporte désormais hors de France. La jeune femme à la coiffe blanche et à la robe jaune et bleue arrive cette année en Suisse, au rayon produits laitiers, en même temps que la marque qu'elle représente. Et, en Espagne, remplace sous la griffe La Lechera, la jeune fille à la personnalité moins forte, habillée façon tyrolienne et porteuse de deux seaux de lait en bois, qui existait depuis vingt-cinq ans et apparaissait, sur les emballages comme dans les publicités. Au passage, la marque en profite pour investir de l'autre côté des Pyrénées le créneau des desserts. Alors qu'en Belgique, La Laitière était déjà commercialisée après avoir remplacé avec succès Jacky, qui était en déclin. « En Europe, lorsque l'on teste ce que suggère le tableau de Vermeer, il évoque partout les mêmes images de ruralité, d'économie domestique bien gérée, de savoir-faire, de temps anciens. Même si, au Sud, ce passé semble plus récent », relève Sophie de Rovere, directrice marketing Europe de Lactalis Nestlé Produits Frais. C'est sur ces valeurs maternelles, apaisantes et intemporelles que compte bien capitaliser la griffe.

La célébrité du tableau rend d'emblée l'icône familière. « Les prétests réalisés dans différents pays ont montré, comme rarement pour une marque, une cohérence des images et une unanimité d'adhésion auprès des consommateurs », souligne Benoît de Fleurian, directeur général de l'agence Ogilvy & Mather. L'atout d'une déclinaison européenne ? Des budgets plus importants et la possibilité de réaliser davantage de films pour accompagner les différentes gammes. Avec toutefois une contrepartie : les idées liées à l'histoire française, comme 1789, ne peuvent plus être des sources d'inspiration. Et un sujet comme les inondations n'a pas pu être développé car, en Espagne, il est particulièrement douloureux. « Les thèmes doivent être universels. Cela nous pousse vers le spectaculaire », poursuit-il.

Le nouveau film publicitaire, « La Dîme », met donc en scène une levée d'impôts où les percepteurs entassent au fil de leur récolte toutes sortes d'objets dans une charrette. Mais, mis en appétit par l'odeur échappée de la maison de La Laitière, ils finissent par tout laisser sur place pour les remplacer par des cartons de ses produits. En France, le spot soutient la sortie de Feuilleté de mousse, une nouveauté parsemée de feuilles de chocolat croquant se montrant en pot transparent pour afficher son innovation. En Belgique et en Espagne, il vante la mousse au chocolat et, en Suisse, les petits pots de crème.

Des actions sur le terrain
Dans l'Hexagone, où la marque revendique sa présence dans 56 % des foyers en 2008, elle a réalisé l'an dernier un chiffre d'affaires de 288 millions d'euros, en hausse de 11 % pour une progression des volumes de 3 %. Un bon score sur un marché global qui marque le pas, porté par une présence sur deux des segments qui progressent : les desserts et les basiques. Le pot en verre reste en effet l'un des piliers de la marque et a même connu l'an dernier des progressions en volume de 7 à 8 %. « Il est très évocateur pour les consommateurs des produits simples vers lesquels ils veulent faire un retour. Mais, avec La Laitière, même des produits sophistiqués comme Feuilleté de mousse doivent apparaître comme quotidiens et le public doit imaginer que leur conception est toute naturelle », note Jean-Marc Bernier, directeur général de Lactalis Nestlé Produits Frais. La marque ne veut surtout pas, en effet, apparaître comme élitiste. Elle n'hésite pas non plus à soutenir fermement en France ses nouveautés, avec un gros programme prévu cette année en « street marketing » et en animations en magasin. « Nous avons renforcé les actions sur le terrain », précise-t-il.

D'autres pays devraient, eux aussi, voir arriver La Laitière. « Nous voulons doubler les volumes en Europe à l'horizon de cinq ans », affirme Sophie de Rovere. A quelque trois cent cinquante ans, le personnage imaginé par Vermeer n'est pas près de prendre sa retraite.

CL. B.